Processus stage-gate : définition, fonctionnement & avantages

Table des matières

Le processus stage-gate, ou phase-gate, est une approche intéressante pour planifier, gérer, et suivre vos projets. 

Cette méthode fait partie des méthodologies « traditionnelles » ou séquentielles, comme Waterfall ou Prince2.

Dans cet article, je vous explique comment fonctionne le processus Stage-Gate, quels sont ses avantages et dans quelle situation l’utiliser.

Qu’est-ce que le processus Stage-Gate en gestion de projet ?

Le processus Stage-Gate (étape-porte en français) est une approche de gestion de projet qui consiste à vérifier à chaque étape du projet son avancement, les risques projet et la qualité des livrables.

Cette approche de gestion de projet a été développée dans les années 1980 par Robert G. Cooper, afin de répondre aux impératifs des entreprises concernant les projets d’innovation et de recherche & développement.

Un projet Stage-Gate est donc structuré en différentes étapes ou phases successives, séparées par des portes (jalons). Chaque porte implique de prendre une décision pour passer (ou non) à l’étape suivante. Une fois la porte passée, il n’est plus possible de revenir en arrière.

Les Gates (ou portes) sont ainsi des jalons décisionnels, qui permettent de contrôler l’avancement du projet et de prendre des décisions efficacement pour l’ensemble du portefeuille projet.

Cette approche de management de projet est très utile pour les projets longs et complexes, afin de les découper en sous-projets et de tenir les échéances.

Bien que Stage-Gate ait été pensée à la base pour le développement de produits (product management), elle s’applique parfaitement à la gestion de projets, simples comme complexes.

Représentation du processus Stage-Gate, de l’idéation (product discovery) au lancement d’un produit

Pourquoi utiliser la méthode Stage-Gate ?

La méthode Stage-Gate apporte de nombreux bénéfices, aussi bien pour le chef de projet que pour l’entreprise, aussi bien des startups que des multinationales. 

D’ailleurs, je vous recommande chaudement de l’utiliser sur vos projets, afin de réunir les décideurs, le sponsor et les principales parties prenantes, pour faire le point hors Comité de Pilotage et prendre les décisions qui s’imposent.

Voici les principaux bénéfices que peut vous apporter cette approche:

  • Adaptable au contexte.
    Il est possible d’ajuster le nombre d’étapes et de portes à la taille de votre projet, à son contexte, à ses caractéristiques ainsi qu’à celles de l’organisation.
  • Approche structurée.
    La structure proposée par ce modèle permet de garder le projet sur les rails, en contrôlant l’avancement et la qualité des livrables de façon régulière pendant les « portes ».
  • Simple à comprendre.
    Cette approche n’utilise aucun terme ou concept méthodologique, ni aucun vocabulaire spécifique à la gestion de projet. Il est donc facilement compréhensible, même pour un novice en la matière.
  • Diminution des risques.
    La planification des portes à intervalles réguliers permet de réduire le niveau général de risque du projet. En contrôlant activement l’évolution du projet, on s’assure ainsi que la majorité des risques ne se produiront pas.
  • Outil d’aide à la décision.
    La planification de jalons décisionnels réguliers (les portes) permet de s’assurer de l’engagement des parties prenantes clés, tout en facilitant le processus de décision.
  • Simplicité de gestion du portefeuille de projets.
    Chaque porte correspondant à une décision à prendre, il est aisé de savoir précisément où en est chaque projet dans le portefeuille du service ou de l’entreprise.
  • Priorisation par la valeur.
    Cette approche permet enfin de se concentrer sur les produits et projets qui apportent de la valeur. En effet, parmi les décisions que l’on peut prendre pendant les « portes », il est possible d’arrêter le projet s’il n’a plus lieu d’être ou s’il n’est plus prioritaire.

Quand utiliser l’approche Stage-Gate ?

Le processus Stage-Gate se prête particulièrement bien aux situations suivantes :

  • Projets complexes.
    En découpant le projet en plusieurs phases successives, le chef de projet peut contrôler plus finement l’avancement de son projet. La structure des portes permet également de s’assurer que le travail réalisé répond bien au besoin, au fur et à mesure des étapes.
  • Grandes équipes ou équipes interfonctionnelles.
    Toutes les personnes impliquées dans un projet ne travaillent pas à temps plein dessus. Et ça devient vite une galère sans nom pour réunir toutes ces personnes en même temps. Les portes ou jalons décisionnels permettent ainsi de travailler uniquement avec les personnes concernées par l’étape en cours du projet.
  • Développement de nouveaux produits et services.
    Le développement de nouveaux produits physiques ou digitaux, ou de services, s’appuient sur des approches de gestion de produit, ou product management, dont fait partie le processus Stage-Gate. Cette approche a d’ailleurs initialement été conçue pour cela.
  • Projets d’innovation.
    Les projets d’innovation, de R&D, de marketing, de refonte de processus, …, se prêtent particulièrement bien à l’utilisation de cette méthode.

Comment fonctionne le processus Stage-Gate ?

1 ) Les 6 principes du Stage-Gate

La philosophie de la méthode Stage-Gate repose sur 6 principes-clés : 

  1. Optimiser le processus d’innovation.
    Ce principe vise à améliorer continuellement le processus d’innovation en l’alignant avec les objectifs stratégiques de l’organisation. Il implique l’identification et l’élimination des inefficacités, l’amélioration de la collaboration entre les équipes, et l’adaptation aux changements de l’environnement de marché.
  2. Embrasser les risques en les manageant.
    Ce principe encourage à identifier, analyser et atténuer les risques à chaque étape du projet. Plutôt que d’éviter les risques, cette approche les accepte comme une partie inévitable de l’innovation, tout en mettant en place des stratégies pour les contrôler.
  3. Accélérer le processus créatif.
    Ce principe se concentre sur l’accélération du développement de nouvelles idées et solutions. Cela implique la mise en place d’outils et de méthodes pour stimuler la créativité, l’encouragement à l’expérimentation rapide et l’apprentissage continu.
  4. Des décisions basées sur des options.
    Dans le cadre du Stage-Gate, les décisions sont prises en considérant diverses options et scénarios. Cela signifie évaluer différentes voies possibles, peser les avantages et inconvénients, et choisir celle qui offre le meilleur équilibre entre bénéfice et risque.
  5. La performance via la visibilité.
    Ce principe souligne l’importance de la transparence et du suivi des progrès du projet. En rendant les étapes du projet visibles pour toutes les parties prenantes, il est plus facile de mesurer la performance, d’identifier les goulots d’étranglement et de prendre des mesures correctives en temps opportun.
  6. Culture de la responsabilité et de la discipline.
    Le dernier principe insiste sur la nécessité d’instaurer une culture où la responsabilité et la discipline sont primordiales. Cela implique de définir clairement les rôles et les responsabilités, d’encourager l’engagement des équipes envers les objectifs du projet, et de maintenir une discipline stricte dans le respect des étapes et des délais.

2 ) Les 6 étapes du processus Stage-Gate

Bien que je recommande d’adapter le processus Stage-Gate à votre projet et à son contexte, le modèle « par défaut » comporte 6 étapes, que je vais détailler : 

  1. L’idéation.
  2. L’évaluation.
  3. La planification.
  4. La conception.
  5. Les tests & validations.
  6. Le lancement.

Ces 6 étapes correspondent à ce que l’on peut retrouver dans un projet classique de lancement de produit.

1 ) L’idéation

La phase d’idéation peut aussi se nommer la phase d’avant-projet.

L’objectif est d’imaginer le projet, de retenir des objectifs pertinents, et surtout d’évaluer la faisabilité du projet, et sa pertinence au travers d’études de faisabilité, d’études de marché et de business case.

On se base généralement pour cela sur plusieurs critères, tels que l’état du marché et du secteur d’activité, les attentes des consommateurs, la valeur apportée au client final, la concurrence, etc…

Cette phase d’idéation s’organise généralement autour d’ateliers de travail et de brainstorming, et donne lieu à une étude de faisabilité (ou un business case), qui justifie de continuer à explorer le projet, par un ROI (Return On Investment) intéressant.

2 ) Évaluation

Dans la phase d’évaluation, l’objectif est de cadrer plus précisément le projet qui a été retenu.

Nous allons donc :

  • Définir plus précisément les enjeux, attentes et objectifs du projet.
  • Analyser les moyens nécessaires à la mise en œuvre de ce projet (ressources humaines, compétences nécessaires, achat de matériaux, budget, etc…)
  • Étudier la rentabilité du projet.

Cette étape donne lieu à la rédaction d’une charte de projet, qui précise de manière succincte tout ce qu’il y a à savoir sur le projet.

3 ) Planification

Lors de la phase de planification, l’équipe projet définit de façon collaborative le plan de projet, c’est à dire la manière dont ils envisagent tous ensemble d’atteindre les objectifs fixés. 

Ce plan de projet contient généralement un planning, un tableau des actions, un plan de gestion des risques, un plan de communication, etc…

C’est également lors de cette étape que l’on peut élaborer :

  • Un plan de production.
    Ce document permet d’anticiper la production à grande échelle d’un produit, et d’anticiper tout ce qui pourrait avoir un impact.
  • Un plan de lancement.
    Ce document permet de cadrer le lancement d’un nouveau produit sur un marché.

4 ) Conception

La phase de conception consiste à mettre en œuvre le plan de projet précédemment imaginé. 

On va donc construire les livrables attendus. C’est généralement la phase la plus longue du projet.

5 ) Tests & Validation

La phase de tests & validations consiste à faire des vérifications pour s’assurer de la qualité et de la conformité des livrables et du produit.

L’objectif ici est de solliciter l’avis et les feedbacks des utilisateurs finaux.

6 ) Lancement

Cette dernière étape consiste à lancer le nouveau produit sur le marché. 

Cette démarche s’accompagne généralement :

  • D’un processus de production.
    On détermine le volume de produit à produire, la manière de le faire, de le stocker, de l’acheminer jusqu’aux clients finaux, etc…
  • D’une stratégie marketing.
    L’objectif est de déterminer quelle est l’audience cible, comment communiquer sur le produit, quels bénéfices mettre en avant, quelles campagnes marketing mettre en place, …

3 ) La validation des portes

Structuration des portes

Chaque étape se clôture par une porte, qui permet de valider que les livrables sont bien conformes aux attentes et au niveau de qualité attendu, avant de passer à l’étape suivante.

Pour valider le passage d’une porte, vous aurez donc besoin de trois informations :

  • Les inputs.
    Il s’agit de l’ensemble des éléments qui doivent être revus puis validés. On y retrouve donc les livrables, la documentation, les prototypes, etc…
  • Les critères.
    Il s’agit d’indicateurs de mesure quantitatifs permettant d’évaluer objectivement de la qualité des inputs. Ces critères doivent être définis dès le démarrage du projet, afin d’être le plus efficace possible.
  • Les outputs.
    Les outputs correspondent au résultat du passage de la porte.

Ces éléments doivent être consignés au sein d’un procès verbal, un document écrit qui statue de la décision prise lors de cette « gate ». Ce document doit être signé par l’ensemble des parties prenantes ayant prises cette décision.

4 décisions possibles

Lors des passages de portes, vous pouvez prendre l’une des 4 décisions ci-dessous :

  • Go.
    Un go signifie que le projet est maintenu, et que l’on peut passer à l’étape suivante et mobiliser les ressources nécessaires.
  • Hold.
    Hold signifie en attente. La porte n’est pas validée, les livrables ne sont pas conformes à 100%. Il reste encore du travail à fournir avant de passer à la phase suivante. Il sera alors nécessaire de vérifier à nouveau la porte avant de passer au reste du projet.
  • Recycle.
    Pour continuer le projet, il est nécessaire de revenir à une étape antérieure. Cela peut arriver lorsque de nouveaux éléments qui sont arrivés en cours de route doivent être prise en compte. Exemple : modification du marché, arrivée d’un nouveau concurrent, évolutions des attentes des consommateurs, …
  • Kill.
    Le projet est arrêté en l’état. Par exemple : priorisation d’autres projets en lieu et place de celui-ci, ROI plus assez important, le besoin d’origine a changé, la stratégie d’entreprise a évolué, …

Processus Stage-Gate vs Méthodes Agiles

Tout comme les méthodes agiles (comme Scrum), Stage-Gate a été pensé pour gérer des projets d’innovation et de dévleoppement produit.

Mais contrairement aux méthodes agiles qui proposent une approche itérative et incrémentale, et une adaptation constante aux changements, Stage-Gate s’appuie sur une approche plus linéaire et séquentielle (une phase après l’autre).

Pour vous y retrouver, voici les principales différences entre l’agilité et l’approche Stage-Gate :

CaractéristiquesStage-GateMéthodes agiles
ApprocheLinéaire & SéquentielleItérative & Incrémentale
FocusMacroMicro
EquipeGrande équipe interfonctionnelle, certains collaborateurs à temps partiel sur le projet.Petite équipe pluridisciplinaire, à temps plein sur le projet.
FlexibilitéOui, tant que les étapes et les portes sont respectées.Oui, l’adaptation aux changements est au coeur de l’agilité.
Cadre de travailLiberté de choisir le nombre d’étapes et de portes. Le fonctionnement des portes est cadré.Libre, auto-organisation de l’équipe. Le manifeste agile tient sur 1 page.
Duréepas de durée préconisée pour les phases du projet ou les jalons décisionnels.Fonctionnement incrémental, par sprints successifs. Un sprint dure entre 1 et 4 semaines traditionnellement.

Comment intégrer l’agilité dans un processus Stage-Gate ?

A première vue, Le processus Stage-Gate est à l’opposé des méthodologies agiles, et il n’est pas possible de réconcilier les deux. 

Les agilistes les pus convaincus diraient même que faire du Stage-Gate, c’est faire du waterfall et donc de l’anti-agile.

Pourquoi ? Car Stage-Gate propose une approche bien plus structurée que les méthodes agiles.

Pourtant, il est tout à fait possible de combiner ces deux méthodologies, en implémentant l’agilité à chacune des étapes du projet. Les livrables de chaque phase sont ainsi réalisés de façon itérative et incrémentale au travers de sprints.

Cette approche hybride, qui peut convenir à la gestion de produits en entreprise, se nomme le processus Next Gen Stage-Gate.

Schéma de fonctionnement du processus Next Gen Stage Gate. Les sprints agiles s’exécutent à l’intérieur de chacune des 5 phases.

Limites & Inconvénients de l’approche Stage-Gate

Bien que cette approche apporte de nombreux avantages, elle a toutefois 3 limites principales :

  • Elle peut limiter l’innovation et la créativité.
    Le découpage de projet en 5 étapes et en portes à passer les unes après les autres peut brider la créativité et limiter l’idéation, notamment dans le cas de projets d’innovation ou de R&D.
  • L’approche structurée est vue comme étant trop rigide pour les petites entreprises.
    Les entreprises agiles et les startups ont besoin de pouvoir pivoter du jour au lendemain, sans être gêné par des processus. La structure linéaire proposée par la méthode Stage-Gate peut limiter l’agilité organisationnelle.
  • Elle nécessite que les parties prenantes clés participent aux « gates ».
    Enfin, pour que l’approche fonctionne, il est crucial d’avoir les décideurs, le sponsor du projet et les parties prenantes clés sur chacune des portes, afin de prendre les décisions nécessaires (Go / Nogo).

8 conseils pour bien utiliser le processus Stage-Gate dans vos projets

Je vous recommande de mettre en place les pratiques suivantes pour profiter au maximum des avantages d’un processus Stage-Gate :

  1. Adaptez vos phases et portes à votre projet.
    Vous pouvez vous reposer sur le modèle par défaut, mais personnellement, je préfère créer mes propres phases et portes, afin de m’adapter au mieux à mon projet, et à son contexte.
  2. Assurez-vous que les portes sont revues avec rigueur.
    Tout le principe du Stage-Gate est de vérifier qu’à chaque porte ou jalon, le travail réalisé correspond bien aux attendus. Prenez le temps de bien regarder l’ensemble des livrables en détails, afin d’éviter de valider quelque chose qui vous poserait problème plus tard.
  3. Sollicitez différentes parties prenantes.
    Il ne suffit pas d’avoir la validation du sponsor ou du client. Demandez également aux référents métiers ou aux utilisateurs finaux leur feedback.
  4. Cultivez une culture d’amélioration continue.
    Tout l’intérêt de travail en phases-portes est de faire le point à chaque porte, de prendre du recul, et de s’améliorer ainsi de phases en phases, tout au long du projet. On devient de plus en plus efficace avec le temps.
  5. Montrez votre processus Stage-Gate lors de la réunion de lancement.
    Si vous adoptez cette approche, prenez le temps de présenter votre découpage projet lors de votre réunion de lancement projet, afin d’être sur la même longueur d’onde avec l’ensemble des parties prenantes.
  6. Précisez pour chaque porte qui doit être pérsent et donner son accord.
    En fonction des livrables associés aux portes, vous pouvez inviter certaines parties prenantes spécifiquement, pour recueillir leur accord. Expliquez le jalon, les attentes, les livrables concernés et les décisions-clés à prendre.
  7. Tracez le Go ou No go via un procès verbal.
    Le go ou le no go indique si la porte est validée et si vous pouvez poursuivre le projet ou non. Toute décision doit être tracée dans un procès verbal, un document devant être signé par l’ensemble des parties prenantes qui prennent cette décision de poursuivre ou non le projet.
  8. Faites le point sur les leçons apprises.
    Enfin, avant de vous précipiter sur la suite du projet, prenez un peu de temps pour noter les leçons apprises lors de cette phase projet, en bien ou en mal. Celles-ci vous permettront de vous améliorer sans attendre sur la prochaine phase, mais également de « nourrir » votre bilan projet.
Image de Thibault Baheux

Thibault Baheux

Tour à tour chef de projet puis manager d'équipe depuis 2008, je suis aujourd'hui directeur de projet indépendant. J'ai décidé via ce site de démocratiser la gestion de projets et de la rendre accessible à tous. Mes certifications : Prince2 Foundation, CompTIA Project+ certified, PSM1, PSPO1, Lean Six Sigma Black Belt.

Devenez un chef de projet performant

Et recevez dans votre boîte mail un exemplaire du guide « 15 facteurs-clés pour réussir vos projets ».

Ce guide est un condensé de conseils pratiques, tirés de mes 14 années d’expérience en pilotage de projets.