L’effet tunnel est l’ennemi public n°1 des chefs de projet. On le considère même comme la cause principale de l’échec des projets. C’est dire !
Il s’agit d’une erreur très courante, et fatale. Même les chefs de projet confirmés peuvent se faire avoir, s’ils manquent d’attention !
Dans cet article, je vous explique ce qu’est l’effet tunnel, quels sont les risques qu’il peut engendrer, mais surtout ce que vous pouvez mettre en place pour éviter un effet tunnel destructeur sur vos projets.
C’est quoi l’effet tunnel en gestion de projet ?
L’effet tunnel est une situation où un projet est en retard par rapport aux estimations, où l’équipe projet travaille en sous-marin, et surtout qui donne très peu de visibilité sur son avancement et la consommation de la charge de travail ou du budget.
Il s’agit de la première cause d’échec des projets, et il peut se produire pendant tout le cycle de vie du projet. L’effet tunnel est généré le plus souvent par une mauvaise communication entre le commanditaire et le chef de projet, ou par une absence de communication.
Le projet est alors mené d’une traite, et il faut attendre la fin du projet pour avoir un aperçu du livrable final. Sans surprise, le plus souvent, c’est décevant et ça ne correspond pas à ce qui avait été demandé.
En conséquence de l’effet tunnel :
- Le résultat attendu est non conforme, le client est insatisfait et l’équipe projet doit revoir sa copie.
- Les charges, les délais et le budget explosent tous.
- Le client perd confiance dans la capacité du prestataire à réaliser le projet, et comme il n’a aucun rapport d’avancement, il commence à se faire ses propres films. A la clé : situations de crise à gérer, et échanges tendus.
Prenons par exemple un projet de développement informatique, qui consiste à créer en partant de zéro une nouvelle application de comptabilité. On estime la durée du projet à 3 ans. Avec un effet tunnel, le client commencerait à voir les premiers livrables au bout de ces 3 années, même s’il a déboursé de grosses sommes depuis.
Quelles sont les causes de l’effet tunnel ?
L’effet tunnel est une erreur courante, qui provient le plus souvent de l’une ou de plusieurs de ces causes :
- Absence de communication entre le prestataire et le client.
Une fois le projet lancé, le chef de projet et son équipe travaille en sous-marin et ne donne plus signe de vie au client, jusqu’à temps que le livrable soit finalisé. - Mauvaise communication avec l’ensemble des parties prenantes.
Le chef de projet et les parties prenantes parlent, mais ne s’écoutent pas et ne se comprennent pas, ce qui génère frustrations et incompréhensions à la pelle. Le chef de projet comprend de travers le besoin du client, et travaille avec son équipe sur la réalisation d’un produit qui ne correspond pas au besoin. - Un chef de projet pas assez présent ou qui ne suit pas son projet.
Le chef de projet est le garant de la réussite du projet. S’il ne suit pas son projet ou s’il n’est pas assez disponible, le projet peut partir à la dérive sans même qu’il s’en rende compte. - Une méthodologie de travail pas adaptée.
Le choix d’une méthodologie de gestion de projet non adapté peut augmenter les risques de rencontrer un effet tunnel sur ses projets. - Un planning qui n’est pas réaliste.
Un planning optimiste mais impossible à tenir génère systématiquement un effet tunnel. Le chef de projet est sous pression pour tenir des échéances impossibles à tenir, et préfère attendre d’être dans le mur plutôt que de lever la tête en avance et de remanier le calendrier. - De mauvais indicateurs dans le tableau de bord.
Une absence d’indicateurs ou de mauvais KPI revient pour le chef de projet à piloter le projet à l’aveugle, sans aucune garantie du livrable final. - Des conditions de validation floues.
Lorsque les conditions de validation des livrables ne sont pas correctement définies dans le cahier des charges, l’équipe projet ne sait pas vraiment quels sont les critères importants, et navigue à vue. Vous avez toutes les chances de devoir les retravailler derrière. - La rétention d’information.
Sans ces informations importantes, le chef de projet part sur des suppositions qui peuvent s’avérer désastreuses pour le projet. La rétention d’informations arrive lorsque des personnes ont leur propre agenda et leurs propres intérêts, contraires au projet. - Des demandes de changement acceptées sans analyse des impacts.
A chaque demande de modification du projet, le chef de projet doit analyser les impacts en terme de charges, budget, délais, risques avant d’accepter ou de refuser. S’il ne le fait pas, l’effet tunnel a toutes les chances de créer une dérive des objectifs. - Un projet qui n’est pas séquencé et qui n’a aucun jalon.
Si le projet dure 3 ans, il faut donc attendre la fin du projet (+ quelques mois de retard classiques) pour avoir un premier aperçu des livrables. Et bien souvent, le besoin a évolué entre temps et la qualité laisse à désirer. - Une sous-estimation des risques et des contraintes projet.
Sous-estimer les risques et les contraintes d’un projet peut créer bien des difficultés techniques et organisationnelles par la suite. Tous ces aléas participent à la création d’un effet tunnel.
Quels sont les risques de l’effet tunnel ?
L’effet tunnel a un pouvoir destructeur sur vos projets, et amène de nombreux risques, à la fois pour le client (ou le maître d’ouvrage), et à la fois pour le prestataire (ou maître d’œuvre).
1 ) Risques pour le client (maîtrise d’ouvrage)
Voici les risques principaux que l’effet tunnel peut générer côté maîtrise d’ouvrage, client et commanditaire du projet :
- Perte financière ou de parts de marché.
Le projet peut coûter plus cher que prévu pour le client, et pire encore, l’effet tunnel pourrait lui faire perdre des parts de marché et laisser la concurrence le distancer. - Décalage des échéances.
Cela peut également générer des décalages d’échéances et des retards à répétition. - Lancement de produit raté.
En ne faisant pas de point régulier avec le client, le risque est de présenter un résultat qui ne correspond absolument pas au besoin du client, et de torpiller le lancement du produit. Couplez-le aux pertes financières et au décalage du projet dans le temps, et vous avez là un cocktail explosif. - Altération de l’image de l’entreprise.
Un produit de mauvaise qualité, une échéance non tenue ou des pertes de marché peut sensiblement altérer l’image de l’entreprise auprès du public, de ses clients, de ses partenaires et fournisseurs. - Perte de confiance dans le prestataire ou le chef de projet.
Enfin, le client peut perdre confiance dans la capacité du prestataire ou du chef de projet à aller au bout de ce projet.
2 ) Risques pour le prestataires (maîtrise d’œuvre)
Voici les risques principaux que l’effet tunnel peut générer côté maîtrise d’œuvre, et prestataire :
- Forte insatisfaction client.
Le client se lasse du manque de communication et de visibilité, et exprime son mécontentement et son insatisfaction. - Perte de la confiance du client.
L’effet tunnel peut générer une perte de confiance du client dans la capacité de son prestataire, du chef de projet et de son équipe d’experts à mener à bien le projet et livrer un résultat de qualité. - Perte de futurs contrats et marchés.
La forte insatisfaction client et la qualité médiocre du produit peuvent faire perdre de futurs contrats et marchés au prestataire non seulement avec ce client, mais aussi avec son entourage. Un client mécontent en parle trois fois plus à ses connaissances qu’un client satisfait. A méditer. - Charge de travail et coûts supplémentaires.
L’effet tunnel génère bien souvent une surcharge de travail et donc des coûts supplémentaires qui n’étaient pas prévu dans le budget prévisionnel du projet. Et il paraît compliqué pour le prestataire d’aller ensuite réclamer des sous supplémentaires à son client, pour un problème qui n’est pas de son fait. - Diminution du ROI (retour sur investissement).
Tous ces coûts supplémentaires diminue sensiblement le retour sur investissement espéré pour ce projet. Dans le pire des cas, le projet peut ne plus être rentable. Dans ce cas, il faut se demander s’il ne vaut pas mieux l’arrêter de manière prématurée. - Un résultat à la qualité exécrable.
Le livrable fourni au client ne correspond pas du tout à ce qu’il attendait. Certains besoins ne sont pas couverts, et la qualité n’est pas au rendez-vous. Tout ceci génère une insatisfaction client et des charges et coûts supplémentaires. - Des rumeurs qui apparaissent.
Enfin, le manque de communication que l’on constate lors de l’effet tunnel fait apparaître des rumeurs, des on-dit. C’est la pire chose qui puisse se passer, car les parties prenantes se désengagent activement du projet, ne faisant qu’amplifier les autres risques.
Comment éviter l’effet tunnel sur ses projets ?
Vous l’avez compris, un effet tunnel peut être désastreux pour votre projet, pour votre crédibilité et même pour votre carrière de chef de projet.
Voici 13 conseils que je vous recommande de suivre pour éviter l’effet tunnel sur vos projets :
- Séquencer votre projet en plusieurs phases.
- Planifier des jalons à intervalles réguliers.
- Anticiper les risques et les contraintes de votre projet.
- Planifier et prioriser votre projet de manière réaliste.
- Ajouter des marges à votre calendrier projet.
- Analyser les impacts d’un changement avant de dire oui.
- Choisir des indicateurs de suivi pertinent, et construire un tableau de bord.
- Organiser des instances de gouvernance régulièrement.
- Spécifier les critères de validation de chaque livrable.
- Impliquer le client dans la prise de décision.
- Être transparent sur la progression du projet.
- Entretenir une bonne relation avec son client et tenir ses engagements.
- Adopter une méthode agile.
1 ) Séquencer votre projet en plusieurs phases
En découpant votre projet en plusieurs séquences ou en plusieurs phases, vous réduisez la complexité de celles-ci, et vous multipliez les points de contrôle permettant de valider une phase avant de passer à la suivante.
Chaque projet étant unique, il comportera plus ou moins de phases. Je vous recommande de les identifier dès le démarrage de votre projet. Celles-ci devraient d’ailleurs clairement apparaître sur votre macro-planning projet.
Toutefois, une phase projet ne devrait pas dépasser 9 mois. Si possible, je vous conseille même de passer sous la barre des 6 mois. Personnellement, j’essaye au maximum d’avoir des séquences de 3 mois. mais encore une fois, cela dépend de vos projets.
Par la suite, je vous conseille de ne faire un planning détaillé ou un diagramme de Gantt que pour la phase en cours ou la phase à venir. Les phases lointaines de votre projet auront tout le temps d’être affinée quand le temps sera venu. Pour le moment, c’est trop tôt.
2 ) Planifier des jalons
Les jalons projet agissent comme des points de contrôle du projet, exactement comme les étapes sur le Tour de France.
C’est l’occasion de se réunir avec le client, le commanditaire du projet, le sponsor et les parties prenantes clés, et de :
- Contrôler l’avancement du projet.
C’est l’occasion de faire le point sur le pourcentage d’avancement, la consommation des charges et du budget, et le degré de fiabilité des prochaines échéances. - Vérifier la conformité des livrables.
Le client s’assure que les livrables fournis jusque-là sont bien conformes à 100% à ses attentes. S’il détecte des non-conformités mineures, on dit alors qu’il « émet des réserves ». - Valider les livrables et la poursuite du projet.
Le client valide formellement et par écrit la conformité des livrables et donne son accord pour poursuivre le projet sur les phases suivantes.
Un jalon donne forcément lieu à une trace écrite, soit sous forme de compte-rendu de réunion, soit sous forme de procès-verbal de recette.
La mise en place de jalons est ce qu’on appelle un processus stage-gate.
3 ) Anticiper les risques et les contraintes
Les risques sont des événements futurs et incertains qui peuvent survenir en cours de route et avoir des impacts conséquents sur votre projet.
L’idée est donc d’identifier ces risques et de les gérer pour éviter qu’ils ne surviennent.
Pour cela, pour chaque risque identifié que vous ne pouvez pas accepter en l’état, vous devez mettre en place des plans d’atténuation et de mitigation des risques.
Cela permet soit de réduire les impacts du risque, soit de réduire la probabilité de survenance, soit les deux à la fois.
Concernant les contraintes, il est indispensable que vous les connaissiez, afin d’en tenir compte dans votre planning et votre plan de management de projet. N’hésitez surtout pas à interroger les différentes parties prenantes à ce sujet lors de l’initialisation de votre projet.
4 ) Planifier et prioriser le projet de manière réaliste
Faire un planning optimiste et ambitieux, avec une échéance finale rapprochée, pour plaire au client, c’est bien. Mais le tenir, ce serait mieux.
Lorsque vous réalisez votre planning détaillé, je vous conseille de tenir compte des éléments suivants :
- Dépendances entre tâches.
Certaines tâches doivent être terminées avant que d’autres puissent commencer. Ces dépendances doivent être identifiées et prises en compte dans le planning détaillé. - Contraintes existantes.
Les contraintes et les prérequis existants influent forcément sur le plan d’action à mettre en place, et sur la planification des différentes activités. - Difficulté de réalisation.
Plus une tâche est complexe, plus l’incertitude augmente, plus vous avez de chance de rencontrer des imprévus en cours de route. Vous devez également en tenir compte lors de votre planification. - Disponibilité des acteurs.
Les experts affectés à votre projet ne sont pas tout le temps disponible, et peuvent intervenir sur d’autres projets. Il vous faut également tenir compte de leur disponibilité, afin d’établir un calendrier projet cohérent. - Tâches parallèles.
Enfin, vous devez prendre en compte les tâches qui s’exécutent en parallèle dans votre planning, et vous assurer qu’une ressource projet n’est pas affectée à deux tâches en parallèle.
5 ) Ajouter des marges au calendrier projet
Des imprévus surviendront forcément en cours de route. C’est le lot de tous les projets. Et contrairement aux risques, les imprévus ne peuvent pas s’anticiper à l’avance.
Pour éviter qu’ils cassent votre planning, je vous recommande de mettre en place des marges (ou buffer ou tampon), afin de sécuriser vos principales échéances.
Il s’agit d’une ou de plusieurs périodes de temps supplémentaires qui vous permettent d’absorber des retards ou des imprévus, sans pour autant décaler les échéances suivantes du projet.
Plutôt que d’en ajouter à chaque tâche, je vous conseille plutôt de créer des marges à la fin d’une séquence de tâches et/ou avant un jalon important.
6 ) Analyser les impacts d’un changement avant de dire oui
Il est courant, au cours du projet, de voir le client demander des modifications de périmètre ou des ajouts de fonctionnalité.
Le marché évolue, les besoins de sa clientèle également, et il doit nécessairement s’adapter. Pas de souci de ce côté, c’est totalement normal.
Cependant, ce n’est pas pour autant que vous devez dire oui à tout.
En effet, chacune de ces modifications doit faire l’objet d’une demande de changement formelle de la part de votre client.
Pour chaque demande de changement, le chef de projet doit ensuite l’analyser, et comprendre ses impacts, aussi bien sur les échéances du projet, que la charge de travail, le budget, les risques, les contraintes et les dépendances.
En fonction de cette analyse, vous pourrez ainsi décider de la suite à donner à cette demande de changement :
- Oui, c’est accepté.
Vous êtes en mesure d’absorber sans impact cette charge de travail supplémentaire et vous acceptez d’ajouter cette tâche au périmètre du projet. - Oui, à condition de signer un avenant.
Vous pouvez réaliser la tâche, mais pas sans mettre à risque le projet. Ce travail supplémentaire doit donc faire l’objet d’un avenant, soit pour l’intégrer au projet existant, soit pour déclencher un nouveau projet, à la suite de l’actuel. - Non, les impacts sont trop importants.
Les changements demandés remettent en cause le projet dans sa globalité. Ils ne peuvent donc pas être accepté en l’état. Si ceux-ci sont primordiaux pour le client, alors vous pouvez renégocier le périmètre du projet, mais les échéances, la charge de travail et le budget devront nécessairement évoluer eux aussi.
7 ) Construire un tableau de bord avec des KPI pertinents
Chaque projet doit avoir son propre tableau de bord, avec des indicateurs de performance (KPI) pertinents, pour suivre son avancée.
Le plus souvent, on retrouve les indicateurs suivants :
- Consommation réelle de la charge de travail vs estimé.
On peut ainsi estimer à un instant T si l’on a travaillé plus ou moins que prévu. Ces informations permettent également de dégager une tendance et de prévoir l’atterrissage à fin de projet. - Consommation réelle du budget vs estimé.
Cet indicateur élaboré à un instant t permet de se projeter dans le temps quant à la consommation du budget alloué au projet. - Pourcentage d’avancement réel du projet vs estimé.
A un instant t, le chef de projet peut ainsi connaître le pourcentage de progression réel de son projet, et le comparer à ses estimations afin de déterminer s’il est en avance ou en retard. - Courbe en S et valeur acquise.
Ces indicateurs font partie du pilotage par la valeur acquise, ou earned value management (EVM). Ils permettent d’avoir une vision détaillée d’où se situe le projet par rapport aux estimations, et de retravailler les estimations à fin de projet. C’est un outil d’aide à la décision pour le chef de projet.
8 ) Organiser des instances de gouvernance régulièrement
La pire chose que vous pouvez faire sur un projet est de travailler en sous-marin, de ne pas parler à votre client, et de ne tenir informé aucune des parties prenantes de votre progression.
Pour contrer cela, je vous invite à organiser des réunions de gouvernance à intervalles réguliers :
- Comité de pilotage.
Invitez les décisionnaires et les parties prenantes clés pour un point d’avancement mensuel. - Comité opérationnel.
Réunissez les acteurs techniques et opérationnels de manière hebdomadaire afin de discuter des détails et difficultés techniques de votre projet.
Cela vous permettra de présenter l’avancement du projet à votre client, et de passer en revue les difficultés que vous avez rencontré en cours de route.
Vous pourrez également passer en revue les versions préliminaires des livrables afin de vous assurer que ceux-ci correspondent bien aux attendus. Si ce n’est pas le cas, vous pouvez ainsi corriger le tir avant qu’il ne soit trop tard.
En plus de cela, je vous invite vivement à mettre en place un plan de communication adapté à votre projet, et strict, dans le sens où vous le respecterez. Cela vous forcera à communiquer régulièrement sur sa progression.
9 ) Spécifier les critères de validation de chaque livrable
Vous devriez avoir pour chaque livrable des critères de validation de défini dans le cahier des charges ou la charte projet.
Si ce n’est pas le cas, pas de panique, et pas besoin de bloquer le projet. C’est à vous, en tant que chef de projet, d’aller au devant du client pour expliciter ce point.
Demandez-lui quels sont les critères importants sur lesquels il va se baser pour valider chaque livrable.
S’il n’apporte pas de réponse claire, vous pouvez toujours lui soumettre une version préliminaire pour avoir son feedback, et lui demander si ça lui convient en l’état.
Bien souvent, il vous dira que « pas du tout », et vous donnera enfin les informations dont vous avez besoin pour assurer la qualité des livrables.
10 ) Impliquer le client dans la prise de décision
Les prises de décision ne doivent pas être unanimes côté chef de projet.
Au contraire, je vous invite à partager vos difficultés et les problématiques que vous rencontrez sur les différentes instances de pilotage que vous avez mis en place (COPIL, COPROJ).
Vous pourrez ainsi expliquer aux participants ce qui se passera si rien n’est fait, les différentes possibilités, et vous prendrez ainsi la décision en comité. Tous ensemble.
Si le client n’est pas impliqué dans ces décisions, il ne peut pas se rendre compte de l’ampleur des problématiques rencontrées, et il croira toujours que vous êtes en mesure de tenir les délais alors qu’objectivement ce n’est plus le cas.
11 ) Être transparent sur l’avancement du projet
Partagez les bonnes nouvelles, et ne cachez pas les mauvaises.
Je sais, c’est tentant de vouloir rassurer le client à tout prix en lui certifiant main sur le cœur que « on tiendra les délais ». Mais si vous savez que ce n’est pas possible, alors vous venez juste de lui mentir.
Et un mensonge, tôt ou tard, ça se sait. Et c’est catastrophique. Car vous perdrez la confiance du client.
Mieux vaut être transparent quitte à chagriner sur le coup son client, plutôt que de lui répéter pendant des semaines que tout va bien pour le mettre ensuite devant le fait accompli.
12 ) Maintenir de bonnes relations et tenir ses engagements
Attention aux engagements que vous prenez. Au détour d’un échange ou d’une présentation, on a vite fait de s’engager. Parfois même sans s’en rendre compte. Mais ce n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd.
Votre client retient les engagements pris, et s’attend à ce que vous les respectiez. Et si ce n’est pas le cas, votre crédibilité descend en flèche, et vous finirez par perdre sa confiance.
Dernier exemple en date, je pilote un projet pour l’un de mes clients, et son prestataire lui envoie un mail avec une prise d’engagement, certifiant que les livrables documentaires demandés seraient fournis sans faute semaine 18.
Pas de doute possible à la lecture. Seulement voilà : Cette échéance a été annoncée par le prestataire, alors que le client pouvait attendre quelques semaines de plus.
Et je vous le mets dans le mille : le Vendredi de la dite semaine, à 18 heures, il n’a toujours rien reçu. Les livrables ont été fournis une semaine plus tard. Et avec tout un tas de fautes, d’erreurs, etc… A se demander si ça avait été relu.
Aujourd’hui, ce client a perdu confiance, car ça s’est répété trop souvent. Et maintenant, à chaque engagement pris par ce prestataire, il s’attend à ce qu’il lui fasse faux-bond.
13 ) Adopter une méthode agile
Enfin, si vous travaillez sur des projets d’innovation, de R&D, ou encore de développement produit (un produit pouvant être physique, digital ou un service), alors je vous recommande vraiment d’adopter une méthodologie agile telle que Scrum.
En effet, travailler en mode agile implique de découper son projet en cycles courts itératifs (les sprints), de livrer quelque chose à la fin de chaque sprint au client (un incrément), et d’obtenir du feedback sur celui-ci lors de la sprint review.
C’est probablement l’une des meilleures manières d’éviter l’effet tunnel, mais elle implique de revoir en profondeur l’organisation de l’entreprise, la manière de penser un projet et de travailler. Et il est également nécessaire de former les collaborateurs à la philosophie agile.
10 erreurs à éviter
Pour éviter l’effet tunnel, je vous recommande également d’éviter les erreurs suivantes :
- Céder aux sirènes de l’optimisme.
Être confiant dans sa capacité à mener un projet au bout, c’est bien. Mais face aux inquiétudes de votre client, ce n’est pas en répétant « ne vous inquiétez pas, on livrera dans les temps » que vous allez le rassurer. Bien au contraire ! - Faire un planning détaillé pour la totalité du projet.
Plus vous planifierez loin dans le temps, plus vous aurez de chances de vous planter. Une planification détaillée à plus de 3 mois est une hérésie. Découpez votre projet en phases, réalisez un macro-planning pour tout le projet, puis détaillez uniquement la phase actuelle du projet. - Gérer son projet en sous-marin.
Le mode sous-marin consiste à faire quelque chose dans son coin, sans se préoccuper des parties prenantes, et surtout sans tenir informé son client. C’est à proscrire ! Les comités de pilotage ne sont pas là pour faire joli. Ils permettent de vérifier à intervalles réguliers que le projet est toujours sur les rails, et à agir en conséquence si ce n’est pas le cas. - Piloter le projet à vue.
Suivre son projet sans tableau de bord, c’est un peu comme conduire une voiture sans jauge à essence. Vous ne savez jamais vraiment quand vous aurez une panne sèche, mais ça arrivera. Si vous pilotez votre projet à vue, vous allez au devant de graves problèmes. - Penser qu’une bonne relation client peut tout couvrir.
Ce n’est pas parce que vous vous entendez bien avec votre client que vous pouvez cacher des merdes sous le tapis. Tôt ou tard, ça se verra. Et à ce moment-là, les relations vont se tendre et vous aurez perdu toute crédibilité et toute confiance de la part de votre client. - Rejeter la responsabilité sur des personnes ou des événements extérieurs.
Ok, il y a des cas de force majeure (pandémie Covid), mais cela reste rare. En tant que chef de projet, vous êtes garant de la réussite du projet. Vous en portez la responsabilité sur les épaules. Et vous ne pouvez pas vous y dérober. - Dire oui à tout ce que le client demande.
Dire oui à tout ce que le client souhaite faire évoluer revient à modifier et dénaturer sans cesse le projet. On rajoute tout le temps de nouvelles choses à faire, on repousse les échéances, on augmente la charge de travail, le tout sans budget supplémentaire. Tous les ingrédients sont réunis pour un effet tunnel dévastateur. - Négliger l’analyse de risques.
Les risques sont des événements futurs et incertains qui pourraient impacter négativement votre projet, et vous coûter beaucoup d’argent. Vous avez donc tout intérêt à soigner votre analyse de risques, ainsi que vos réponses. - Prendre des engagements qui ne sauraient être tenus.
Attention à ne pas parler avant de tourner votre langue. Un engagement est vite pris sans faire attention. Et le client s’attend à ce que vous teniez un engagement pris, en tant que professionnel. - Gérer le projet d’un seul tenant.
Tout mener d’une traite sans mettre en place de points de contrôle ou de jalons est suicidaire : vous avez toutes les chances de présenter un livrable final à côté de la plaque par rapport à ce qu’attend le client.